Décision, modalités, délais… La renonciation à une succession n’est pas un acte anodin. Il peut s’apparenter à un choix économique, mais aussi à une véritable stratégie patrimoniale. Toutes nos explications.
Renoncer à une succession : différents objectifs
Renoncer à la succession : une liberté de choix
L'héritage est le patrimoine qu'une personne laisse à son décès. Il existe des règles qui, tout en protégeant les héritiers réservataires, permettent à chacun de léguer tout ou partie de son patrimoine aux personnes qu'il désigne par testament.
Au nom du principe de la liberté de choix qui résulte de l'article 768 du Code civil :
L'héritier peut accepter la succession purement et simplement ou y renoncer. Il peut également accepter la succession à concurrence de l'actif net lorsqu'il a une vocation universelle ou à titre universel.
Trois options sont donc offertes aux héritiers d'une succession, qu'elle ait fait ou non l'objet d'un testament.
Renoncer en raison des dettes
La renonciation à succession est l'acte par lequel l'héritier rejette unilatéralement ses droits successoraux. Elle ne peut intervenir qu'après le décès, doit être totale et clairement exprimée. Bien souvent, le refus d'héritage intervient lorsque le passif est supérieur à l'actif, ce qui impliquerait, pour l'héritier, de devoir payer les dettes du défunt.
Renoncer pour avantager un proche
Une autre forme de renonciation relève, en réalité, d'une gestion de patrimoine. Le fait de renoncer à une succession modifie l'ordre successoral et permet à un proche héritier dans l'ordre successoral d'être privilégié. En vertu du principe légal de la représentation, celui-ci peut hériter directement, bénéficier de l'abattement du renonçant et ne pas avoir à payer deux fois les droits de succession.
La renonciation peut donc devenir un acte de transmission du patrimoine. Ainsi, il est parfois fiscalement intéressant de refuser la succession pour avantager un enfant. En sautant une génération, le coût global des droits de succession se trouve amoindri.
Gare à la requalification en donation
Dans le cas où un enfant refuse la succession de ses parents et que ses propres enfants reçoivent l'héritage en ses lieu et place, ils bénéficient de l'abattement prévu en ligne directe et les droits ne sont payés qu'une fois.
Du fait de l'allongement de l'espérance de vie, nous perdons souvent nos parents à un âge mûr, voire proche de la retraite et l'héritage que nous pouvons recevoir ne nous est plus indispensable. En conséquence, plutôt qu'accepter une succession puis faire une donation à ses propres enfants, il peut s'avérer plus judicieux de renoncer purement et simplement.
De même, il est possible de renoncer à une succession tout en acceptant d'être bénéficiaire d'une assurance-vie. Tous ces moyens d'optimisation fiscale lors de l'ouverture d'une succession révèlent l'importance de prendre conseil auprès de son notaire quant aux différentes options et à leurs conséquences. Et ce, d'autant plus que, depuis novembre 2017, la renonciation peut être faite devant notaire.
Comment renoncer ?
La renonciation ne se présumant pas, le choix appartient toujours à l'héritier qui peut renoncer de deux façons.
La première suppose de se rendre au tribunal judiciaire proche du domicile du défunt. Il suffit de télécharger et de compléter un formulaire de renonciation à succession (imprimé Cerfa no 15828*4), en y joignant :
- la copie de l'acte de décès du défunt,
- celle de son propre acte de naissance
- et celle d'un justificatif d'identité.
Il n'est pas utile de motiver son refus. Lorsque le dossier est complet, le greffe délivre un récépissé au déposant. Ces démarches peuvent aussi être réalisées sans se déplacer, par courrier recommandé.
La seconde façon de renoncer peut, depuis la loi Justice entrée en vigueur en 2017, être prononcée devant un notaire. Ce dernier se chargera de transmettre la renonciation à succession, au tribunal, dans le mois qui suit.
Pour prendre une décision en toute connaissance de cause, cette option garantit une bien meilleure sécurité juridique et patrimoniale.
Les délais pour renoncer
Ces démarches sont encadrées dans un délai de quatre mois à compter de l'ouverture de la succession. Passé ce délai, les autres héritiers, les créanciers ou l'État peuvent recourir à la sommation d'opter.
C'est alors que s'ouvre un délai de deux mois où la décision de renoncer doit être prise. A défaut de réaction, la succession est tacitement acceptée. Si personne ne le met en demeure d'opter, l'héritier dispose d'un délai de dix ans pour prendre sa décision.
Mais si le droit successoral traite de l'héritage de manière patrimoniale, fiscale..., d'autres motifs plus personnels peuvent amener à renoncer à une succession. Quel sentiment peut-on ressentir au moment de faire ce choix si définitif ? Celui de n'avoir jamais existé, d'être un traître... Plus largement, le droit ne peut pas tout régler, et il n'est jamais simple psychologiquement de faire fi de sa qualité d'héritier.
Les effets de la renonciation
La décision de renoncer emporte comme conséquences le fait de ne pas avoir hérité et de ne pas être tenu de payer les dettes du défunt.
Si l'héritier renonçant à des descendants, ces derniers héritent à sa place ; s'il n'en a pas, ce sont les cohéritiers qui se répartissent les droits. Cela étant, le renonçant conserve les donations qu'il a reçues du vivant du défunt.
Toutefois, s'il existe des héritiers réservataires, il peut devoir les indemniser si la donation excède les droits qu'il aurait reçus s'il avait accepté la succession.