En France, une personne ayant des enfants n’est pas libre de transmettre la totalité de son patrimoine. En effet, elle ne peut disposer librement que d’une partie de celui-ci, appelée la quotité disponible. De quoi s’agit-il et comment peut-on la calculer et la transmettre ?
Quotité disponible : calcul, définition et recours
La quotité disponible ordinaire
Seule une personne sans enfants peut disposer de la totalité de son patrimoine, par donation ou testament. Dans ce cas, la quotité disponible est égale à 100 %.
Mais les personnes ayant des enfants sont astreintes à des règles plus contraignantes. En effet, la loi française est très protectrice pour ces enfants, qui sont considérés comme des héritiers réservataires.
Ce qui veut dire qu'ils ont droit à une certaine part du patrimoine du défunt. Ces dispositions étant d'ordre public, on ne peut y déroger. L'octroi de cette part diminue d'autant la quotité disponible. Ce sont les article 912 à 917 du CC qui traitent de la quotité disponible et de la réserve héréditaire.
Ils en prévoient notamment le calcul, qui dépend du nombre d'enfants qu'avait le défunt.
- En présence d'un enfant, la réserve héréditaire et la quotité disponible représentent chacune la moitié (50%) du patrimoine de la personne décédée.
- Si elle avait deux enfants, la réserve héréditaire se monte à 66,6 % et la quotité disponible à 33,3 %.
- Enfin, si trois enfants héritent du défunt, la réserve héréditaire sera de 75 % du patrimoine et la quotité disponible de 25 %. Etc.
Les enfants ne sont pas les seuls héritiers réservataires
S'ils viennent à décéder avant l'ouverture de la succession, les petits-enfants peuvent le devenir à leur tour.
Par ailleurs, si un couple n'a pas d'enfants, le conjoint survivant se voit également reconnaître cette qualité. En revanche, depuis une loi de 2006, les parents du défunt ne sont plus considérés comme des héritiers réservataires.
Il faut enfin noter que la loi n°2021-1109 du 24.08.2021, confortant le "respect des principes de la République", contient des dispositions en faveur d'héritiers réservataires qui seraient lésés dans le cadre d'une succession internationale.
Si la loi applicable, dans le pays en question, ne protège pas les héritiers réservataires, ils peuvent bénéficier d'un prélèvement compensatoire sur la part du patrimoine du défunt se trouvant en France.
La quotité disponible spéciale entre époux
En présence d'enfants, une personne peut très bien, par divers moyens, écarter son conjoint de tout droit à sa succession. En l'absence d'autres dispositions prises, de son vivant, par le défunt, le conjoint peut aussi se voir réserver la quotité disponible ordinaire, dont le montant dépend, nous l'avons vu, du nombre d'enfants.
Mais le défunt peut aussi avoir voulu lui transmettre une part allant au-delà de cette quotité disponible ordinaire. On parle alors de "quotité disponible spéciale entre époux".
Cette question est régie par l'article 1904-1 du Code civil. Il prévoit que le défunt, s'il ne s'est pas contenté de laisser à son conjoint la quotité disponible de droit commun, ait le choix entre deux autres options :
- La première lui permet de laisser à son conjoint la totalité de sa succession en usufruit. Ce qui signifie que le conjoint survivant peut disposer, jusqu'à son décès, des biens du défunt, dont les héritiers réservataires conservent la nue propriété.
- S'il choisit la seconde option, la plus favorable, le défunt transmet au conjoint survivant le quart de sa succession en pleine propriété et les trois quarts en usufruit.
Comment transmettre la quotité disponible ?
On peut se demander, en effet, comment une personne peut disposer de la quotité disponible, c'est-à-dire de la partie de son patrimoine qu'elle peut transmettre à sa convenance.
Il existe, pour cela, deux moyens principaux : la donation ou le testament. Il existe une différence essentielle entre eux. En effet, une personne se voyant léguer des biens par testament doit attendre le décès du testateur pour en prendre possession.
Alors que, dans le cas d'une donation, la jouissance des biens légués est immédiate. Elle a donc lieu du vivant du donateur. Cette donation, qui concerne donc la quotité disponible, peut être faite en faveur des enfants mais aussi du conjoint.
Dans ce dernier cas, on parle de donation entre époux ou "au dernier vivant". Elle permet de sauvegarder les droits du conjoint survivant.
Bien entendu, le testament comme la donation doivent respecter les règles relatives à la réserve héréditaire.
Les contestations et les recours possibles
Il est cependant des cas où les héritiers réservataires se sentent lésés par la manière dont le défunt a disposé de son patrimoine.
C'est notamment le cas d'enfants d'un premier lit, dont l'un des parents se serait remarié. Dans certains cas, ils pourraient juger excessive la part laissée au second conjoint.
Ils pourraient en effet estimer qu'elle rogne leur part héréditaire. Dans une telle situation, quand il y a des enfants du premier lit, l'avantage matrimonial consenti par le défunt à son conjoint est considéré comme une libéralité.
Comme telle, elle ne peut pas dépasser le montant de la quotité disponible. Si c'est le cas, les héritiers réservataires peuvent intenter une action en retranchement, appelée aussi action en réduction . Elle consiste à constater le dépassement de la quotité disponible, et à obtenir, s'il est fait droit à la demande, une réduction de la part accordée au conjoint survivant.
Cette réduction doit ramener sa part à la quotité disponible. Pour que les enfants d'un premier lit puissent, en tant qu'héritiers réservataires, entreprendre cette action en réduction, certaines conditions doivent être réunies.
- En effet, les époux doivent s'être mariés sous le régime de la communauté universelle
- et avoir inséré, dans le contrat de mariage, une clause d'attribution intégrale des biens au conjoint survivant.
On comprend bien qu'une telle clause soit au bénéfice du conjoint mais puisse désavantager les enfants issus d'une première union.