Arme à double tranchant, la clause bénéficiaire incluse dans votre contrat d’assurance vie peut aussi bien vous permettre de transmettre un patrimoine en franchise de droits de succession à la personne de votre choix – que se retourner contre vous en vous interdisant de disposer librement du capital amassé sur votre contrat. Autant y regarder à deux fois avant de la rédiger !
Assurance vie : La clause bénéficiaire en 3 questions
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La clause bénéficiaire en question
Pas anodine du tout, la clause bénéficiaire, la plupart du temps une formule type inscrite dans votre contrat d'assurance vie à laquelle vous n'avez pas forcément prêté attention au moment de la signature.
Nombre d'idées reçues circulent à son sujet : vous pensez, par exemple, qu'il suffit de mentionner le nom de votre conjoint et « à défaut » celui de vos enfants pour préserver les intérêts de votre famille et lui garantir, à votre décès, la transmission du capital épargné sur le contrat. Pas si sûr si, entre temps, vous vous êtes remarié et avez omis de modifier la clause.
Vous ignorez aussi sans doute qu'une fois la désignation expressément acceptée par le bénéficiaire lui-même, celle-ci est irrévocable : vous ne pourrez plus en choisir d'autre et n'aurez même plus la possibilité de disposer du capital de votre contrat sans son accord.
Vous avez des excuses ! Car si les assureurs et autres prescripteurs de contrats d'assurance vie savent très bien faire valoir l'intérêt fiscal de la clause bénéficiaire (qui devrait vous permettre de transmettre une part non négligeable de votre patrimoine hors droits de succession), ils se gardent bien de vous expliquer les implications d'une notion lourde de conséquences juridiques... et dont le mécanisme complexe leur a peut-être échappé !
Pourtant, nombreuses sont les questions qui se posent en la matière : faut-il ou non désigner un bénéficiaire lorsque vous souscrivez un contrat d'assurance vie ? Devez-vous vous contenter de la clause type incluse dans le contrat ou en rédiger une sur-mesure ? Vaut-il mieux informer le bénéficiaire ou au contraire garder le secret ? Que risquez-vous si vous utilisez cette clause pour gratifier un parent éloigné, un(e) ami(e), une maîtresse, aux dépens de vos héritiers réservataires ?
Faut-il garder secret le nom du bénéficiaire ?
Rien ne vous oblige, lorsque vous souscrivez un contrat d'assurance vie, de désigner la ou les personne(s) qui en recueilleront les fruits si vous veniez à disparaître.
Au mieux, le capital constitué entrera dans votre succession et sera partagé entre vos héritiers, sans bénéficier des avantages fiscaux liés à la transmission de patrimoine via l'assurance vie. Au pire, si personne ne connaît l'existence du contrat souscrit, le fruit des cotisations versées sur votre contrat sera perdu pour tout le monde...sauf pour l'assureur (on estime à un milliard d'euros le montant des sommes déposées sur les contrats d'assurance vie « en déshérence », c'est-à-dire non réclamées au décès du souscripteur).
D'où l'intérêt, sinon la nécessité, d'user de la possibilité offerte par l'art. 132-8 du code des assurances, de « stipuler » à votre assureur que les prestations qu'il vous aurait normalement dues de votre vivant soient versées à une ou plusieurs personnes de votre choix nommément désignée(s) ou aisément identifiable(s). Conjoint, enfant, parent, ami, concubin, à vous de désigner comme bénéficiaire(s) qui bon vous semble..., mais pas n'importe comment !
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Comment rédiger la clause ?
Pour vous assurer qu'après votre décès les personnes que vous souhaitiez voir gratifiées le seront bien et que d'autres — notamment vos héritiers — ne seront pas lésés, évitez toute imprécision et maladresse dans la rédaction de la clause désignant votre ou vos bénéficiaires.
Sachez aussi que si le bénéficiaire désigné décède avant vous, le contrat n'aura plus de bénéficiaire et le capital constitué entrera normalement, à votre décès, dans votre succession. Sauf si vous avez pris soin de préciser qui, « par défaut », recueillera la prestation à la place du premier bénéficiaire en cas de disparition. Ainsi désignerez-vous un bénéficiaire de premier, de deuxième, de troisième rang et ainsi de suite sans limite imposée.
Dupont remplacera alors M. Durand si ce dernier décède avant vous ou renonce (comme c'est son droit) au bénéfice du contrat et M. Martin remplacera M. Dupond, si ce dernier décède ou y renonce à son tour.
En effet, ce ne seront pas ses héritiers, mais bien les bénéficiaires désignés à titre secondaires, tertiaires, etc. qui « récupéreront » dans ce cas la prestation. Celle-ci écherra donc à M. Dupond, bénéficiaire du contrat « en second ».
Comment éviter ce risque ? En prenant soin de rédiger la clause de la façon suivante en désignant comme bénéficiaire : « M. Durand vivant ou représenté par ses enfants et, à défaut, M. Dupond ».
Ainsi les enfants de M. Durand, au décès de celui-ci, passeront-ils normalement avant M. Dupond.
Autre « maladresse » à éviter : mentionner comme bénéficiaire « mon conjoint », sans autre précision. A votre décès, plusieurs années plus tard, ce n'est pas forcément celui présent au moment où vous avez rédigé la clause qui recueillera l'argent du contrat : si, entre-temps, vous avez divorcé et vous êtes remarié(e), ce sera votre nouveau conjoint du moment ; si, après votre divorce, vous êtes resté célibataire, ce sera (seront) votre ou vos bénéficiaire(s) désigné(s) à titre subsidiaire.
Conclusion : pour, à coup sûr, vous mettre vous et vos proches à l'abri des mauvaises surprises, il suffit de rédiger la clause de la façon suivante : « mon conjoint non divorcé ou séparé de corps, à défaut mes enfants nés ou à naître, vivants ou représentés par parts égales ; à défaut mes héritiers ou ayants droit ».
Peu importe que vous nommiez précisément (mon épouse, Christine D.) ou non (mes enfants nés ou à naître) vos bénéficiaires — pourvu qu'ils soient aisément identifiables. Par exemple, ne mentionnez pas simplement « mon jardinier » ... en oubliant que vous en avez trois !
Faut-il garder secret le nom du bénéficiaire ?
Toute personne a le droit d'accepter ou de refuser le bénéfice d'un contrat. Soit de façon explicite par une simple lettre adressée en recommandé au siège de l'assuré ; soit de façon implicite, en reprenant, par exemple, la suite du paiement de cotisations périodiques que le souscripteur ne veut ou ne peut plus payer.
L'acceptation est possible à tout moment, à la souscription, tout au long de la vie du contrat, ou seulement au décès de l'assuré, lorsque le bénéficiaire se verra proposer son dû par l'assureur.
Mais il faut savoir que l'acceptation du bénéficiaire du vivant du souscripteur à de lourdes conséquences pour le souscripteur (celui qui a cotisé d'abord pour son propre bénéfice), car il devra dès lors recueillir l'accord du bénéficiaire pour racheter tout ou partie de son contrat, ou demander le versement d'une simple avance.
En effet, juridiquement, la désignation du bénéficiaire d'un contrat est une « stipulation pour autrui » et aux termes de l'article 1121 du code civil « l'auteur d'une stipulation au profit d'un tiers ne peut la révoquer si le tiers désigné a déclaré vouloir en profiter ».
En clair, le souscripteur se retrouve pieds et poings liés par le bénéficiaire acceptant, avec le risque de ne pouvoir disposer de son épargne si ce dernier oppose son refus : en un mot une véritable spoliation... en toute légalité !
Aussi, la simple prudence commande de garder secret le nom de votre bénéficiaire de peur qu'il n'use de cette possibilité : le mode le plus sûr consiste à le désigner dans un testament que vous déposerez chez un notaire (plus sûr que dans un coffre à la banque d'où un héritier indélicat chargé de régler par procuration les dépenses d'un parent âgé ou affaibli peut toujours faire disparaître un testament défavorable pour lui juste avant que son décès ne soit révélé !).
Vous mentionnerez alors sur votre contrat d'assurance vie que l'identité du bénéficiaire désigné figure dans votre testament « déposé chez Me X, notaire, dont l'étude se trouve à... » Cela vous permettra de vous mettre à l'abri d'une acceptation intempestive ou à votre insu du bénéficiaire, tout en préservant ses droits : à votre décès, le notaire l’informera de l'existence de ce contrat.
Mieux vaudrait cependant qu'une loi supprime l'aspect le plus choquant de l'acceptation qui aboutit aujourd'hui à priver le souscripteur de son droit de rachat ou d'avance. Le souscripteur devrait aussi pouvoir changer de bénéficiaire à tout moment, que ce dernier ait ou non accepté le bénéfice du contrat.
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